the past beats inside me like a second heart (noé)

C'était la tenancière du café du coin qui lui avait donné l'adresse. Elle avait baragouiné quelque chose sur le fait qu'il n'était plus le même depuis qu'il était rentré de l'armée mais Charlie n'y avait pas vraiment prêté attention. C'était le genre de phrases clichées qu'on entendait tout le temps à propos des militaires. En même temps, qui pouvait revenir exactement le même après avoir fait la guerre à l'autre bout du monde ? Charlie connaissait Noé, elle le connaissait par coeur et lui aussi. Du moins il connaissait la Charlie de 20 ans qu'il avait laissé lorsqu'ils s'étaient violemment disputés dans la voiture, alors que Néo la ramenait chez sa tante une chaude nuit d'été. Charlie était encore ivre, elle tenait à peine de bout et c'était Noé qui lui avait tenue les cheveux la moitié de la soirée pendant qu'elle se vidait derrière un buisson tandis que la fête autour du feu de camp battait son plein. Noé l'avait mise en garde, ce n'était pas la première fois qu'elle se retrouvait dans un état pareil et il lui avait fait remarqué qu'à chaque été elle mettait la barre encore plus haute dans la connerie. Il lui avait demandé cent fois pourquoi elle s'obstinait à s'auto-détruire et Charlie n'avait jamais voulu répondre. Jamais elle n'avait avoué à quique ce soit l'enfer que lui avait fait vivre son oncle. Alors elle avait hurlé, insulté, juré. Elle avait préféré tout gâcher plutôt que d'avouer. Comme elle l'avait fait avec son mariage treize ans plus tard. Depuis, ils ne s'étaient jamais reparlé. Trop fiers, sûrement.

Mais le passé était le passé, le présent était le présent et depuis qu'elle était revenue à Wauwatosa pour récupérer son mari et surtout ses filles, Charlie n'avait pas passé une journée sans penser à son meilleur ami d'enfance. Il n'était pas dans le top des priorités, celles-ci étant d'enrayer la procédure de divorces et renouer avec ses filles mais il en faisait partie quand même. Maintenant qu'elle habitait avec Melvin depuis qu'il s'était blessé, et qu'elle avait retrouvé un peu de son quotidien avec les filles elle abordait plus sereinement ses journées. Et en cette froide mais ensoleillée journée de février elle s'était mise à la chasse de Noé, la menant jusqu'à devant cette maison. Charlie, tremblait, claquait presque des dents alors qu'elle venait à peine de quitter la chaleur de sa jeep quand elle toqua à la porte. Elle n'avait pas remarqué qu'elle était si stressée jusqu'à ce qu'elle constate que ses mains tremblaient. Et si il était toujours fâché ? Si il lui claquait la porte au nez ?

J'essaie de continuer ma vie tant bien que mal, j'essaie de mettre mes traumatismes de côté pour essayer de me reconstruire, simplement c'est pas si simple que ça. Ma place de chirurgien à l'hôpital me conviens très bien, elle me permet d'avancer à mon rythme et puis surtout, de ne penser à rien d'autre que mes patients. Un vide complet qui me fait du bien. Malheureusement, je ne peux pas travailler 24h/24 ni même 7j/7, je dois prendre du repos et je dois reconnaître que pour moi, ce repos qui pour tout le monde est quelque de super, pour moi c'est complètement l'enfer. Aujourd'hui c'est l'un de ces fameux jour de repos et autant dire que dès le petit matin je suis comme un lion en cage. J'allume la télé pour faire un bruit de fond dans la maison, je prends ma douche ainsi que mon petit déjeuner, mais je fais tout ça dans un mécaniste pure et simple. Je me demande ce que je vais bien pouvoir faire de ma journée. J'ai envie de sortir pour m'aérer la tête sans trop savoir où aller, même s'il fait froid dehors tant pis, un bon mentaux et ça devrait bien se passer. Oui, c'est une bonne idée. Par dessus mon t shirt j'enfile un pull et puis un gros manteau. Au passage, je chope un bonnet ainsi qu'une écharpe et une paire de gant. Je ne dois pas oublier mon téléphone, au cas où il y aurait une urgence à l'hôpital. Alors que je me dirige vers la porte pour sortir, celle-ci se met à sonner. Qui peut bien venir me rendre visite, Quinn ? Non, impossible. Lorsque j'ouvre, je reste quelques instants bouche bée. Charlie. Je hausse mes sourcilles, c'est une surprise complètement inattendu ça c'est sûr. « Charlie ? » Oui, comme si j'étais pas sûr que ça soit elle est pourtant ça ne fait aucun doute, même avec les années qui se sont écoulés je pourrais toujours la reconnaître.

Charlie n'avait que très peu changé au fil des années, les gens la reconnaissaient facilement et se souvenaient d'elle sans problème, elle en revanche avait un problème pour se souvenir des visages, ce qui pouvaient vexer. Mais voilà, même si Noé n'avait plus rien du gosse de 20 ans mal rasé qu'elle avait connue, elle le reconnut instantanément comme si elle ne l'avait jamais quitté, comme si ils ne s'étaient jamais hurlés dessus un soir d'été en pleine chaleur. Pendant un quart de seconde, le passé était complètement oublié. Son cœur rata un battement quand elle le vit car elle reconnut exactement ces deux prunelles noires. Et elle ne put s'empêcher de fondre dans ses bras, le serrant de toutes ses forces. Elle était tellement contente de le revoir, elle regrettait tellement fort de l'avoir rejeté à l'époque où il était le seul à tenter de comprendre ce qu'il se passait dans sa tête. Elle regrettait de ne pas l'avoir invité à son mariage, elle regrettait de ne pas l'avoir désigné comme parrain de ses filles. Noé avait été un ami fidèle, loyal, même tout au long de l'année lorsqu'elle retournait à Chicago il continuait de lui écrire et elle avait tout gâché juste pour une soirée où elle avait trop bu et où il avait mis le doigt sur ce qu'elle essayait de cacher au monde entier. Elle avait de l'audace, de revenir vers lui que maintenant après tout ce qu'il s'était passé mais elle se sentait totalement désœuvrée, désarmée et elle avait besoin de réconfort, elle avait besoin que quelqu'un qui la connaisse lui redonne un peu d'affection et confiance en elle malgré tout ce qu'elle avait pu faire. Son mariage était en lambeaux, sans parler de sa vie de famille, son travail était en stand-bye, la seule chose qui lui restait était un retour aux sources que Noé matérialisait malgré lui. Alors peut-être qu'elle prenait le risque qu'il la jette comme une mal propre pour le long silence radio qu'elle lui avait fait mais elle savait qu'au fond de lui Noé l'aimait bien et qu'il devait être content qu'elle vienne le voir. Du moins elle l'espérait, car elle n'était pas sûre de pouvoir subir un énième rejet de la part d'un homme aussi important à nouveau...